En dépit d’efforts conséquents sur l’offre de formation initiale, qui porteront leurs fruits dans les années à venir, la démographie des manipulateurs d’électroradiologie médicale (MERM) reste insuffisante pour répondre de manière adéquate aux besoins du territoire français. Les conditions de travail et de recrutement des manipulateurs radio en sont affectées, parfois positivement mais souvent négativement.
« On voit passer des offres à des rémunérations jamais vues »
Les quelques avantages de cette pénurie dans le métier concernent l’amélioration des offres d’emploi et leur flexibilité, afin d’attirer les professionnels dans un secteur particulièrement sous tension : « Dans le libéral, où les employeurs ont toute latitude concernant les salaires, on voit passer actuellement des offres d’emploi à des niveaux de rémunération que nous n’avions jamais vus auparavant. L’intérim se développe beaucoup également », affirme Séverine Moynat, cadre supérieure de pôle à l’AP-HP et présidente du Conseil national professionnel des manipulateurs d’électroradiologie médicale (CNPMEM).
Une situation constatée dès 2021
Dès 2021, le rapport sur la profession réalisé par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) soulignait ainsi des offres de travail temporaire « de 20 à 25 € par heure », soit un salaire mensuel de 2 800 à 3 500 € bruts par mois « pour une mission d’intérim à temps plein ». La mission de l’IGAS avait alors relevé sur un site 10 offres d’emploi proposant dans le cadre de contrats à durée indéterminée des rémunérations « égales ou supérieures à 3000 € bruts mensuels, soit environ 2250 € nets, bonifiables par une reprise d’ancienneté, un treizième mois ou des primes, et assorties d’une organisation du travail attractive, aménagée sur quatre jours par semaine par exemple ».
Nouvelle organisation du travail et mesures d’attraction des étudiants
L’emploi dans les hôpitaux publics ne permet pas de jouer sur les salaires, mais ces employeurs principaux des manips ne sont pas en reste et tablent sur une organisation du travail plus attractive : « Certains services proposent de nouveaux schémas horaires, en offrant par exemple de travailler 10 heures par jour mais sur une semaine de 4 jours », indique Séverine Moynat. Les hôpitaux essaient aussi de fidéliser les étudiants dès leurs stages, par exemple avec des contrats d’engagement en échange de la prise en charge de frais de scolarité.
Une charge de travail « qui peut s’en retrouver augmentée »
Si les offres d’emploi sont plus alléchantes et proposent plus de possibilités de formation continue, la réalité du travail des MERM pâtit du manque de manipulateurs radio. « La charge de travail peut s’en retrouver augmentée avec une possible dégradation des conditions de travail », relate Séverine Moynat. À partir d’un certain point, les équipes peuvent jouer sur la durée ou le nombre de vacations : « Certains centres ayant deux scanners peuvent en fermer un sur certaines demi-journées ou journées », souligne-t-elle.
Une dégradation évoquée par l’IGAS
La dégradation des conditions de travail était déjà remarquée dans le rapport de l’IGAS, qui notait en 2021 que « le sentiment majoritairement exprimé par les MEM, leurs responsables médicaux et leur encadrement est que leurs conditions de travail se dégradent : accroissement du nombre d’examens, examens plus courts grâce aux nouvelles technologies, mais qui augmentent les cadences et réduisent la relation avec les patients, heures supplémentaires plus nombreuses et difficiles à récupérer ou à faire rémunérer […]. L’ensemble de ces éléments est un facteur de lassitude et de perte de sens, selon plusieurs interlocuteurs de la mission. »
Le cercle vicieux de la permanence des soins
À l’hôpital, la spécificité de l’obligation d’assurance de la permanence des soins se fait particulièrement ressentir et pèse d’autant plus sur les organismes que le sous-effectif est marqué : « Les manipulateurs restants vont plus souvent sur des prises en charge urgentes que sur du soin programmé », détaille Séverine Moynat – une activité éprouvante et un cercle vicieux qui peut rapidement user les manips radio, notamment ceux travaillant au scanner des urgences.
Trouver « le juste équilibre » entre MERM et radiologues
« Beaucoup d’hôpitaux aujourd’hui n’ont qu’un manipulateur radio seul avec les patients sur la permanence des soins avec un téléradiologue, et ce n’est pas toujours évident la nuit et le week-end », déplore la présidente du CNPMEM, pour qui l’amélioration des conditions de travail des MERM doit passer par « trouver le juste équilibre pour mettre en phase les effectifs des manipulateurs radio et des radiologues, dont le binôme fait toute la richesse ».
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